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Finance

Les entreprises se penchent sur les nouveaux enjeux de la clôture 2020, Normes comptables

Les entreprises se penchent sur les nouveaux enjeux de la clôture 2020, Normes comptables

Taxonomie, iXBRL, XHTML, ESEF, URD… Le vocabulaire des responsables comptabilité et consolidation en entreprise s’est récemment enrichi 
d’un certain nombre de notions nouvelles
, à défaut d’être poétiques. Beaucoup découlent de la mise en place de l’ESEF, pour « European Single Electronic Format », un format unique de reporting électronique rendu obligatoire par l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) dans le cadre de la directive « Transparence ». « A partir de leur exercice comptable 2020, toutes les sociétés cotées européennes qui consolident en normes IFRS devront utiliser le format « inline » XBRL ou iXBRL pour la préparation de leurs états financiers. Tous les rapports financiers annuels devront être publiés sous forme de page web au format XHTML, un format électronique standard, libre de droits, qui peut être lu par n’importe quel navigateur internet, et qui permet à l’émetteur de donner au document la forme qui lui convient », explique Yasmine Tebaa, directrice marketing et communication du spécialiste des progiciels d’information financière Invoke, qui a publié un livre blanc sur « Le reporting ESEF en 10 questions clefs ».

Enjeu de compréhension et de formation

En pratique, cette évolution implique que les états financiers consolidés soient « tagués », c’est-à-dire étiquetés au format XBRL, selon un référentiel de classification des informations financières défini par l’ESMA : la taxonomie ESEF. « L’entreprise doit pour cela construire sa propre taxonomie d’extension pour refléter ses états financiers. C’est le résultat de l’étape dite de « mapping » qui consiste à rapprocher les états financiers et la taxonomie ESEF de référence. Lorsque qu’aucun concept IFRS adéquat n’est trouvé dans la taxonomie ESEF, l’émetteur pourra créer ses propres éléments d’extension, en veillant à respecter la règle de l’« anchoring », ou « ancrage », imposée par l’ESMA, qui consiste à rattacher les concepts créés à des concepts de la taxonomie ESEF », souligne Yasmine Tebaa.

Il y a donc d’abord un enjeu de compréhension et de formation, pour les ressources métiers comme pour les ressources techniques. « Quelle que soit la solution technique adoptée, il faut sécuriser la donnée XBRL et éviter les allers-retours de correction sur le document de référence de manière à fluidifier les travaux. Le mot d’ordre de l’ESMA est la validation. Il faut pouvoir faire des modifications, même de dernière minute, selon un process collaboratif et traçable. Cela implique de mettre en place des outils flexibles qui s’adaptent au process de l’entreprise, et ne lui imposent pas un nouveau cadre rigide », prévient l’experte.

Niveau d’avancement hétérogène

Outre le sujet comptable et financier, il y a aussi un enjeu de communication. « En parallèle, il faut digitaliser le rapport financier au nouveau format de l’URD. Cela implique de répondre aux obligations réglementaires tout en réussissant à conserver la composante de communication visuelle, qui est développée et importante en Europe. Le passage au numérique ne doit pas appauvrir la forme ou le contenu du document de référence actuel », met en garde Yasmine Tebaa. Finalement, le projet ESEF est aussi un challenge en matière de collaboration. « Il faut réussir à faire collaborer efficacement les différents contributeurs : les financiers, en particulier en charge de la consolidation, mais aussi la communication financière et, à l’extérieur du groupe, l’agence de communication financière, les traducteurs et les commissaires aux comptes », poursuit-elle.

A moins d’un an de la première publication aux nouveaux formats, le niveau d’avancement des entreprises serait « hétérogène ». Quelques entreprises auraient déjà produit leur URD sur l’outil permettant le nouveau format – c’est-à-dire qu’elles ont déjà migré vers le format XHTML en plus du PDF -, mais 
travaillent actuellement sur le mapping et la taxonomie
« Nous constatons que l’état de préparation n’est pas toujours corrélé à la taille des entreprises : certains groupes de petite taille sont assez en avance. Maintenant que la clôture 2019 est achevée, d’autres commencent à travailler sur le sujet. Il ne faut pas s’y prendre au dernier moment, pour avoir le temps de faire un tir à blanc avant 2021 », conclut Yasmine Tebaa.

Réduction du délai de paiement contre remise, le deal profitable de Flex, Contrôle de gestion

Réduction du délai de paiement contre remise, le deal profitable de Flex, Contrôle de gestion

« Cash is king ». Le mot d’ordre, répété tel un mantra par bon nombre de financiers d’entreprise depuis quelques années , a pris encore un peu plus de sens avec la crise du coronavirus qui met la trésorerie de la plupart des organisations sous haute tension . « Le besoin en fonds de roulement n’a sans doute jamais été aussi fort qu’actuellement, confirme Christian Bauwens, directeur de la trésorerie du spécialiste américain de la fabrication d’équipements électroniques Flex. Parce qu’elles sont inquiètes, les sociétés essaient, au maximum, de préserver leur cash-flow dans l’environnement financier actuel, ce qui amoindrit le niveau de liquidités disponibles pour les fournisseurs. »

Une situation paroxystique qui ne ferait, à en croire l’argentier, que s’inscrire dans une tendance de marché plus globale, celle d’un allongement des délais de paiement , qui dépasseraient de plus en plus souvent, au niveau international, la barre pharaonique des 75, voire des 90 jours dans certains cas. « Les clients imposent cela à leurs fournisseurs qui le répercutent, à leur tour, sur leurs propres sous-traitants, ce qui induit un besoin en fonds de roulement croissant pour les entreprises qui arrivent en bout de chaîne », remarque Christian Bauwens.

Des taux compris entre 5 et plus de 10 %

Pour optimiser ses flux de trésorerie et aider ses fournisseurs qui, du grand groupe comme Broadcom et Qualcomm aux plus petites structures installées en Chine, au Brésil ou au Mexique, ne disposent pas des mêmes conditions d’accès au financement, Flex a choisi de faire appel à la plateforme C2FO – dans laquelle a, par ailleurs, investi l’un de ses actionnaires. Son principe ? Proposer au sous-traitant un paiement accéléré de sa facture en échange d’une remise consentie sur son montant. « Le donneur d’ordre paramètre dans le système une enveloppe de trésorerie disponible et fixe un taux de rendement cible, détaille son directeur général, Antoine Trépant. A chaque fois qu’une facture est approuvée, le fournisseur peut alors proposer un taux de remise sur la plateforme qui est accepté, ou non. » Cette validation est réalisée par un algorithme qui, en fonction du montant des factures, pondère le taux pour parvenir au rendement moyen souhaité par le donneur d’ordre.

Pour Flex, le système se révèle particulièrement profitable. « Alors que le taux actuel est de l’ordre de 1 % pour les placements en dollars, nous parvenons à obtenir des taux annuels bruts compris entre 5 et plus de 10 % en fonction de la localisation des fournisseurs et des taux bancaires locaux, détaille Christian Bauwens. Si nous souhaitions atteindre ce niveau de rendement avec un placement classique, nous devrions accroître notre prise de risques. Or, avec C2FO, le risque est inexistant – puisque nous payons nos propres factures -, tout en augmentant la rentabilité de notre liquidité et en répondant au besoin en fonds de roulement de nos sous-traitants. » Aux yeux du donneur d’ordre, la plateforme agit également comme un système d’alerte. Lorsqu’il constate qu’un fournisseur est prêt à consentir un taux de remise très élevé, cela peut indiquer un besoin de cash accru, et donc une potentielle difficulté financière. Un signal transmis au service achats qui se charge, ensuite, de voir si cette préoccupation est bel et bien fondée.

Jouer sur les deux tableaux

De cette logique d’escompte, les fournisseurs se montrent « friands, voire très friands chez l’immense majorité de nos clients car ils se financent ainsi à des taux plus intéressants que ceux qu’ils pourraient obtenir par ailleurs », selon Antoine Trépant. « La plupart de nos sous-traitants sont très intéressés par la continuité du programme, abonde le directeur de la trésorerie de Flex. Toutefois, il est nécessaire d’avoir une certaine stabilité au niveau de l’enveloppe de cash disponible. Les fournisseurs n’apprécient pas trop qu’il y ait des écarts, d’un trimestre à l’autre, dans la mise à disposition des liquidités. »

Alors, pour garantir, voire accroître, le montant des fonds disponibles pour ses sous-traitants, et optimiser encore ses flux de trésorerie, le groupe américain a voulu jouer sur les deux tableaux : en plus de proposer cette solution à ses fournisseurs, il encourage certains de ses clients à recourir à la plateforme sur laquelle il leur propose, lui-même, des remises. Résultat : « Nous l’utilisons à un taux relativement bas avec nos clients, puis la réutilisons, à un taux supérieur, avec nos fournisseurs, précise Christian Bauwens. A nous, ensuite, de réaliser un arbitrage positif entre le taux d’intérêt payé et le taux d’intérêt reçu. » Rarement aura-t-on vu circulation de trésorerie aussi avantageuse.

À noter

 

En France, Danone a récemment adopté C2FO, tout comme Lyreco et Air France.

 

Les liquidateurs de Carillion vont réclamer 250 millions de livres à KPMG, Audit

Les liquidateurs de Carillion vont réclamer 250 millions de livres à KPMG, Audit

C’est la première fois, au Royaume-Uni, qu’un « Big Four » est attaqué en justice par les liquidateurs de l’Etat sur la faillite d’une grande entreprise dont il était commissaire aux comptes. L’agence chargée par le gouvernement britannique d’orchestrer la liquidation de Carillion, le géant du BTP britannique
qui a mis la clé sous la porte en janvier 2018
, se prépare à faire un procès à KPMG. Non seulement il l’accuse de négligence dans son audit des comptes, mais il lui réclame aussi 250 millions de livres.

L’« official receiver », le fonctionnaire employé par l’Insolvency Service, l’agence du gouvernement, pour liquider le groupe de construction, reproche au cabinet d’audit d’avoir laissé croire au conseil d’administration, par ses rapports approuvant les comptes sans réserves, que l’activité était à la fois « rentable et pérenne » alors que ce n’était pas le cas. Et de l’avoir ainsi laissé verser près de 250 millions de livres en dividendes et en commissions de conseil sur deux ans. C’est le remboursement de cette somme que le liquidateur lui réclame désormais.

Obligations contractuelles

« Le non-respect de ses obligations contractuelles et de son devoir par KPMG a conduit [Carillion] à essuyer des pertes qu’il n’aurait pas générées s’il avait été conscient de sa vraie situation financière », reprochent au cabinet les avocats de l’« official receiver », dans un document auquel a eu accès le « Financial Times ».

KPMG a approuvé les comptes de Carillion sans réserves de sa désignation comme commissaire aux comptes en 1999 jusqu’à 2016. En 2017, il a déclaré que l’entreprise était viable au vu de ses comptes semestriels, en dépit de larges provisions pour dépréciations. Quatre mois après l’approbation des comptes par KPMG, Carillion publiait un avertissement sur résultat. Avant de faire faillite cinq mois plus tard, laissant une ardoise de 1,3 milliard de livres auprès des banques, pour une trésorerie tombée à 29 millions.

Dividendes et commissions de conseil

Dans le détail, le cabinet d’audit pourrait être redevable de 234,2 millions versés en dividendes aux actionnaires entre 2014 et 2016, et de 17 millions de commissions de conseil, qui selon l’accusation « n’auraient pas été payés si les irrégularités des états financiers avaient été détectées par KPMG ».

« La première tâche de Carillion est d’identifier les irrégularités matérielles dans ses propres comptes, contre-attaque KPMG. C’est un point essentiel, car sinon il ne peut y avoir de négligence » du cabinet. Celui-ci estime avoir agi « de manière appropriée et responsable » et remarque que Carillion, lui, ne lui a jamais fait de procès.

Enquête du régulateur

L’attaque tombe mal pour KPMG. Une enquête parlementaire sur la disparition de Carillion l’a déjà accusé d’avoir été « complice » de ses pratiques comptables agressives, en échouant à résister au management mais aussi en ratant des signes qui auraient dû l’alerter dans ses comptes sur les goodwills et les revenus.

Le cabinet est par ailleurs sous le coup d’une enquête du
régulateur du secteur, le Financial Reporting Council (FRC)
, qui examine son travail de commissaire aux comptes auprès de Carillion entre 2013 et 2017. Il devrait rendre ses premières conclusions cet été.

Correspondant à Londres

Fraude : ce que les entreprises doivent faire pour s'en protéger, Gestion des risques

Fraude : ce que les entreprises doivent faire pour s'en protéger, Gestion des risques

Les outils numériques permettent, malgré la crise, de rester connectés
et de poursuivre certaines activités professionnelles
. Mais ce contexte
crée des opportunités pour les fraudeurs
. Si l’on analyse la situation au regard de la théorie du triangle de la fraude – chère au criminologue Donald Cressey -, on remarque une augmentation des risques dans une période où l’entreprise se concentre sur sa continuité d’exploitation : pression sur les résultats, perte de repères de certains employés, du fait du travail à distance et de l’éloignement, pouvant les conduire à « franchir la ligne jaune ».

De nouvelles opportunités se profilent aussi si la réorganisation de l’entreprise conduit à relâcher la vigilance sur les principes de séparation des tâches et la réalisation de contrôles. Enfin, le facteur de rationalisation intervient chez tous ceux qui se disent : « Je rembourserai après la crise, je n’ai pas le choix, je dois présenter de bons résultats pour garder mon emploi. » Dans ce contexte, le contrôle interne et la sensibilisation sont structurants.

Des risques multiples

Revisiter les basiques du contrôle interne et les renforcer au regard de la nouvelle organisation pour s’assurer de leur robustesse
afin de prévenir et détecter la fraude
, la corruption et autres pratiques non éthiques sont devenus des impératifs clés. Mais, au-delà de cette revue, des tests et des audits ciblés sur les zones fragiles sont-ils réalisés ? Nombre d’entre eux peuvent être effectués à distance.

Parmi les zones de vulnérabilité classiques : les processus d’achat et de choix des fournisseurs, de trésorerie, de ressources humaines, etc. Ainsi, l’urgence d’approvisionnement peut inciter à recourir à des fournisseurs non référencés, à contourner certaines procédures présentant des risques critiques. Pour s’en prémunir, l’entreprise a-t-elle revisité les seuils d’autorisation et de contrôles et leur fréquence, identifié les départements en sous-effectifs et redéfini les modalités d’approbation et de contrôle ? Une surveillance régulière des modifications de coordonnées fournisseurs et une analyse de données sur les transactions à risque pour détecter des atypismes ont-elles été développées ?

Côté ressources humaines,
la mise en place du chômage partiel
et la baisse d’activité modifient les montants des rémunérations – y compris des variables -, entraînant des risques spécifiques, tels que la déclaration de résultats fictifs aux fins de conserver un bonus. Pour la trésorerie, les risques sont divers : règlement urgent sans sous-jacent économique, maquillage d’opérations frauduleuses en « divers », non-détection de transactions frauduleuses, etc.

Sensibiliser les collaborateurs

Les tentatives de fraude
via l’usurpation de l’identité continuent
. Sans oublier les risques cyber et la recrudescence des cyber escroqueries : vol de documents sensibles, détournements d’actifs. Enfin, les signaux faibles, faciles à identifier par les relations en présentiel, sont à reconstituer. Le télétravail restant de mise,
osera-t-on déranger son chef
pour une question apparemment anodine, mais qui cacherait des risques majeurs ? Sensibiliser les collaborateurs à ces risques est essentiel.

En cas d’alerte, il ne s’agit plus de prévenir, mais de réagir avec rigueur et rapidité – mais sans précipitation – pour diligenter une enquête interne. Celle-ci peut être réalisée à distance, avec l’aide d’outils de pointe adaptés, afin d’identifier les faits, rôles et responsabilités et de limiter les dommages en gelant rapidement les fonds détournés.

Ce qu’il faut retenir de cette situation inédite : le risque zéro n’existe pas, mais l’entreprise doit redoubler de vigilance pour réduire ses risques en déployant les actions et moyens nécessaires.

Antoinette Gutierrez-Crespin, associée EY, Leader France, Forensic & Integrity Services, et George Fife, associé EY, Responsable Market, Western & Europe, Forensic & Integrity Services

Les agences de notation se défendent d'aggraver la crise, Crédits

Les agences de notation se défendent d'aggraver la crise, Crédits

Plus de quatre cents. C’est le nombre de sociétés dont la note a été dégradée depuis janvier par Fitch. Du jamais vu depuis 2009. La troisième agence de notation a averti :
2020 représentera un nouveau pic annuel de dégradations
. De son côté, S&P Global ratings a déjà déclassé ou mis sous surveillance négative un cinquième des entreprises et des émetteurs souverains qu’elle note.

Ces dégradations massives et rapides
inquiètent, au plus haut niveau européen. Ce jeudi, le conseil européen du risque systémique (ESRB), un organe de surveillance qui rassemble des régulateurs européens, a décidé de mesurer l’impact des dégradations à grande échelle des obligations d’entreprises sur les marchés et le système financier.

60% des émetteurs pourraient tomber en junk bund

Ces dégradations peuvent être problématiques pour les émetteurs qui passent en catégorie spéculative. Selon l’ESRB, 60% des émetteurs de la catégorie bien notée se concentrent en réalité dans le bas du tableau (BBB). «Les fonds indiciels devraient vendre rapidement les obligations de ces émetteurs si elles sont retirées du panier de référence, explique l’ESRB. D’autres fonds d’investissement, les banques, les fonds de pension et les assureurs peuvent décider, ou être obligés, de vendre – par exemple en raison de leurs limites de risque, de leurs mandats d’investissement, ou pour protéger leurs positions de solvabilité».

Le gendarme boursier européen inquiet

Début avril, le gendarme boursier européen, l’ESMA, avait déjà fait part de son inquiétude face aux dégradations massives, et demandé aux agences de veiller à ne pas aggraver la crise.
Quant à la

A chaque crise, les agences de notation sont accusées d’être procycliques. C’est pourquoi Moody’s a publié un rapport qui se base sur des statistiques compilées depuis 1920, dans lequel l’agence explique ne pas amplifier les crises.

Noter à travers les cycles

L’agence se justifie : sa politique vise avant tout à noter les entreprises ou les Etats «à travers les cycles». Les notes ont pour objectif de saisir des changements durables dans la solvabilité des émetteurs. Elles sont très stables : seulement 5% des changements de note font l’objet d’une rectification l’année suivante.

Moody’s explique que les dégradations de notes n’augmentent en période de crise que de façon limitée. Au cours des trois derniers incidents de marché, les notes n’ont diminué que d’un demi-cran environ. Rien de comparable avec les mouvements constatés sur les marchés, et qui peuvent être extrêmement erratiques (comme l’écartement des spread, ou la volatilité des CDS, ces produits d’assurance contre un défaut).

Lors de la crise grecque, des dégradations tardives

«On a déjà tenté de mesurer l’impact des dégradations des notes sur les marchés, explique Norbert Gaillard, économiste et consultant indépendant, auteur de deux ouvrages sur la notation financière. C’est difficile. Car on ne peut pas savoir si une dégradation le jour J est exclusivement responsable d’un écartement des spreads à J + 1 ou J + 2 par exemple. Cela s’inscrit dans un mouvement global. Mais, il est vrai qu’en 2011-2012, pendant la crise des dettes européennes, les dégradations de notes souveraines (Italie et Espagne par exemple) ont eu un impact limité car elles étaient tardives».

Autre argument en leur faveur, «dès lors que le VIX (indice de volatilité) dépasse les 20, que les spread s’écartent beaucoup, et que les dérivés de crédit flambent, les investisseurs délaissent les notations, ajoute Norbert Gaillard. Ils regardent les indicateurs de liquidité plutôt que ceux de solvabilité».

Les notations des CLO inquiètent le superviseur européen

L’ESMA, le gendarme boursier européen, a publié, mercredi, un papier sur la notation des CLO (Collateralized Loan Obligation), ces obligations adossées à des prêts consentis à des sociétés de catégorie spéculative. ‘La pandémie COVID-19 présente des risques importants pour les instruments de CLO, qui mettront à l’épreuve la rigueur des méthodes de notation des agences de notation pour répondre à l’évolution des circonstances», écrit-il. ‘L’ESMA suivra de près la réponse des agences de notation à COVID-19 et continuera à évaluer les risques potentiels que représentent les CLO, leurs notations et les processus de notation associés pour les investisseurs, les marchés et la stabilité financière‘.
Le coronavirus renforce la pression sur les finances d'EDF, Gestion des risques

Le coronavirus renforce la pression sur les finances d'EDF, Gestion des risques

EDF tient bon. Pour le moment. En dépit de la crise du coronavirus, l’énergéticien a publié un chiffre d’affaires en baisse de 1 %, à 20,695 milliards d’euros au premier trimestre. Le Covid-19 a amputé ses revenus de 247 millions d’euros et son résultat opérationnel « d’environ 200 millions d’euros », a précisé ce jeudi le directeur financier du groupe public, Xavier Girre.

En début d’année, EDF a notamment profité de meilleures conditions de prix de l’électricité en France et au Royaume-Uni, ce qui lui a permis de compenser en partie la chute drastique de la consommation
d’électricité et de gaz
liée aux mesures de confinement en Europe. Par ailleurs, l’activité énergie renouvelables du groupe n’a quasiment pas été grevée par la crise : ses revenus reculent de 0,4 % au premier trimestre et, en dépit de la forte tension sur les chaînes d’approvisionnement, EDF n’anticipe pas de retard dans ses projets.

2,5 à 3 milliards de manque à gagner

La suite risque toutefois de se compliquer. D’abord parce qu’au deuxième trimestre les mesures de confinement vont jouer à plein sur les performances d’EDF, ensuite parce que la crise du Covid-19 a largement bousculé
le calendrier de maintenance des réacteurs nucléaires du groupe.

Compte tenu du Covid-19, EDF anticipe un niveau de production nucléaire historiquement faible à 300 térawattheures (TWh) en 2020. Un contexte qui doit avoir un impact majeur sur ses résultats : un manque à gagner de 2,5 à 3 milliards d’euros de résultat opérationnel est anticipé pour 2020. S & P Global Ratings anticipe également un manque à gagner de 1 milliard en 2021 puis de 700 à 800 millions d’euros en 2022 pour l’énergéticien. Pour mémoire, avant la crise, EDF tablait sur un résultat opérationnel compris entre 17,5 et 18 milliards d’euros en 2020.

EDF écarte tout projet de recapitalisation à court terme

Dans les prochains mois, les finances du groupe risquent donc d’être mises sous haute pression. Cela d’autant plus qu’une une grande partie des investissements du groupe, liés à l’entretien de ses réacteurs, ne peuvent pas être reportés. « EDF devrait pâtir d’un déficit de flux de trésorerie annuel de 2 à 3 milliards par an », pointe Claire Mauduit, directrice chez S & P Global Ratings. L’agence a placé la note du groupe sous surveillance négative mi-avril.

« Le groupe dispose d’une position de liquidités très solide, il n’y a donc pas d’urgence financière. Nous ne sommes en rien en discussion aujourd’hui avec le gouvernement sur une augmentation de capital », a toutefois tenté de rassurer Jean-Bernard Levy devant l’assemblée générale d’EDF la semaine dernière. Un message qui a été réaffirmé ce jeudi par le directeur financier du groupe : à fin mars, EDF revendique 28,8 milliards d’euros de liquidités.

La crise n’affecte pas la réforme de l’Arenh

Dans ce contexte, les investisseurs ont accueilli avec enthousiasme l’annonce de la poursuite des travaux sur la réforme du mécanisme qui régule la vente du nucléaire historique (
Arenh
) : en fin de matinée ce jeudi, le cours de l’énergéticien figurait en tête des hausses du CAC40, à +3,72 %.

Très attendue, cette réforme devrait donner de l’air aux finances du groupe. « Les discussions se poursuivent entre le gouvernement français et Bruxelles et la Commission de régulation de l’énergie finalise son rapport sur le sujet », a détaillé Xavier Girre. Chargée de plancher sur le « vrai coût de production » de l’énergie nucléaire, la CRE doit communiquer ses conclusions très prochainement à la ministre de la Transition écologique, Elisabeth Borne.

Liquidités : le pire est à venir pour les entreprises, Gestion des risques

Liquidités : le pire est à venir pour les entreprises, Gestion des risques

S’il est un domaine où l’effet « avant-après Covid-19 » est indéniable,
c’est celui de la gestion de trésorerie
. Le tracker des impayés de factures réalisé par Sidetrade révèle une augmentation de 82 % du taux de factures impayées – soit un retard de plus de 10 jours sur factures émises – en France depuis le début du confinement, par rapport à la moyenne observée entre le 1er janvier et le 15 mars. Il est ainsi passé de 19,2 %, avant la pandémie, à 35,1 % au 2 mai. A l’échelle européenne – données consolidées sur la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, la Belgique, l’Espagne et les Pays-Bas -, ce taux a progressé de 60 %, avec un triste record pour la Grande-Bretagne où les impayés représentent 43 % des montants facturés. « A date du confinement, nous avons constaté une forte dégradation du comportement de paiement », confirme Charles Durand, directeur de missions Restructuring Deal Advisory chez KPMG, qui publie ce jeudi 14 mai, avec Sidetrade, une étude intitulée « Culture Cash : enjeux et perspectives ». Il apparaît que le nombre de factures payées chaque semaine par les entreprises de la base de données Sidetrade est passé de 780.000, en moyenne, avant le confinement à seulement 680.000 depuis la mi-mars.

Si beaucoup d’entreprises ressentent déjà frontalement
les effets de ces retards de paiement
sur leurs liquidités, c’est en octobre prochain qu’elles pourraient connaître de réelles difficultés de trésorerie. « Les impacts du Covid vont se faire sentir en trois phases. Tout d’abord la phase de confinement, qui a généré un ralentissement très brutal, voire un arrêt de l’activité, entre mars et mai 2020 dans beaucoup d’entreprises. Puis, une phase progressive de reprise d’activité post confinement, envisagée de juin à octobre 2020. Enfin, de novembre 2020 à juin 2021, une phase de sortie de crise où l’on retrouvera, à terme, un niveau normal d’activité », assure Charles Durand.

Culture cash

La modélisation financière de ces phases montre que, dans un univers sans coronavirus, une entreprise industrielle dotée de clients B to B pouvait espérer voir sa trésorerie progresser régulièrement : parties de 0 en janvier 2020, ses liquidités auraient atteint 110 en juin 2021. Mais ça, c’était avant, et
la pandémie de Covid-19 a totalement changé la donne
.

Dans un premier temps, la situation de trésorerie de cette entreprise théorique n’est pas trop mauvaise : les conséquences de la pandémie sur son activité et son besoin en fonds de roulement (BFR) sont tempérées par les mesures gouvernementales, notamment sur les impôts et taxes, le chômage partiel ou
la mise en place des prêts garantis par l’Etat
(PGE). La situation se gâte à partir du mois de juin : le niveau de trésorerie plonge de mois en mois, pour atteindre un point bas, à -55, en octobre 2020. « C’est l’effet de plusieurs facteurs. La relance de l’activité qui s’amorce actuellement va entraîner une reconstitution des besoins en fonds de roulement : les entreprises vont à nouveau constituer des stocks et payer des factures, alors que les premiers paiements de leurs clients ne seront pas réalisés avant plusieurs semaines ou plusieurs mois. Par ailleurs, avec l’arrêt total ou partiel des mesures gouvernementales, elles ne seront bientôt plus soutenues sur leur masse salariale ou sur leurs dettes sociales et fiscales », regrette Charles Durand. S’ajoute un effet calendrier : l’été est bientôt là et, traditionnellement, le mois d’août est un petit mois d’activité, générant de faibles rentrées 45 jours plus tard. Finalement, l’étude montre que l’entreprise ne récupérera son niveau de trésorerie de janvier 2020 que… dans un an, soit en mai 2021 !

Pour limiter les dégâts ? « Les directeurs financiers doivent avoir une vision claire de leurs positions de trésorerie, pour être mesure de savoir s’ils seront face à une impasse dans les trois à six mois. Il est essentiel de développer une culture cash si ce n’est pas encore fait. Cela passe, dans le contexte actuel, par la mise en place de comités de trésorerie hebdomadaires, en présence des responsables opérationnels qui connaissent les besoins du business. Outre la position de cash classique, deux indicateurs s’imposent dans le contexte actuel : le taux d’échus et le délai de rotation des stocks », détaille Charles Durand. Reste à espérer qu’aucun reconfinement n’aura lieu.

Liquidités : le pire est à venir pour les entreprises, Gestion des risques

Liquidités : le pire est à venir pour les entreprises, Gestion de trésorerie

S’il est un domaine où l’effet « avant-après Covid-19 » est indéniable,
c’est celui de la gestion de trésorerie
. Le tracker des impayés de factures réalisé par Sidetrade révèle une augmentation de 82 % du taux de factures impayées – soit un retard de plus de 10 jours sur factures émises – en France depuis le début du confinement, par rapport à la moyenne observée entre le 1er janvier et le 15 mars. Il est ainsi passé de 19,2 %, avant la pandémie, à 35,1 % au 2 mai. A l’échelle européenne – données consolidées sur la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, la Belgique, l’Espagne et les Pays-Bas -, ce taux a progressé de 60 %, avec un triste record pour la Grande-Bretagne où les impayés représentent 43 % des montants facturés. « A date du confinement, nous avons constaté une forte dégradation du comportement de paiement », confirme Charles Durand, directeur de missions Restructuring Deal Advisory chez KPMG, qui publie ce jeudi 14 mai, avec Sidetrade, une étude intitulée « Culture Cash : enjeux et perspectives ». Il apparaît que le nombre de factures payées chaque semaine par les entreprises de la base de données Sidetrade est passé de 780.000, en moyenne, avant le confinement à seulement 680.000 depuis la mi-mars.

Si beaucoup d’entreprises ressentent déjà frontalement
les effets de ces retards de paiement
sur leurs liquidités, c’est en octobre prochain qu’elles pourraient connaître de réelles difficultés de trésorerie. « Les impacts du Covid vont se faire sentir en trois phases. Tout d’abord la phase de confinement, qui a généré un ralentissement très brutal, voire un arrêt de l’activité, entre mars et mai 2020 dans beaucoup d’entreprises. Puis, une phase progressive de reprise d’activité post confinement, envisagée de juin à octobre 2020. Enfin, de novembre 2020 à juin 2021, une phase de sortie de crise où l’on retrouvera, à terme, un niveau normal d’activité », assure Charles Durand.

Culture cash

La modélisation financière de ces phases montre que, dans un univers sans coronavirus, une entreprise industrielle dotée de clients B to B pouvait espérer voir sa trésorerie progresser régulièrement : parties de 0 en janvier 2020, ses liquidités auraient atteint 110 en juin 2021. Mais ça, c’était avant, et
la pandémie de Covid-19 a totalement changé la donne
.

Dans un premier temps, la situation de trésorerie de cette entreprise théorique n’est pas trop mauvaise : les conséquences de la pandémie sur son activité et son besoin en fonds de roulement (BFR) sont tempérées par les mesures gouvernementales, notamment sur les impôts et taxes, le chômage partiel ou
la mise en place des prêts garantis par l’Etat
(PGE). La situation se gâte à partir du mois de juin : le niveau de trésorerie plonge de mois en mois, pour atteindre un point bas, à -55, en octobre 2020. « C’est l’effet de plusieurs facteurs. La relance de l’activité qui s’amorce actuellement va entraîner une reconstitution des besoins en fonds de roulement : les entreprises vont à nouveau constituer des stocks et payer des factures, alors que les premiers paiements de leurs clients ne seront pas réalisés avant plusieurs semaines ou plusieurs mois. Par ailleurs, avec l’arrêt total ou partiel des mesures gouvernementales, elles ne seront bientôt plus soutenues sur leur masse salariale ou sur leurs dettes sociales et fiscales », regrette Charles Durand. S’ajoute un effet calendrier : l’été est bientôt là et, traditionnellement, le mois d’août est un petit mois d’activité, générant de faibles rentrées 45 jours plus tard. Finalement, l’étude montre que l’entreprise ne récupérera son niveau de trésorerie de janvier 2020 que… dans un an, soit en mai 2021 !

Pour limiter les dégâts ? « Les directeurs financiers doivent avoir une vision claire de leurs positions de trésorerie, pour être mesure de savoir s’ils seront face à une impasse dans les trois à six mois. Il est essentiel de développer une culture cash si ce n’est pas encore fait. Cela passe, dans le contexte actuel, par la mise en place de comités de trésorerie hebdomadaires, en présence des responsables opérationnels qui connaissent les besoins du business. Outre la position de cash classique, deux indicateurs s’imposent dans le contexte actuel : le taux d’échus et le délai de rotation des stocks », détaille Charles Durand. Reste à espérer qu’aucun reconfinement n’aura lieu.

Engie engage une première vague de cessions, Cession d'actif

Engie engage une première vague de cessions, Cession d'actif

« Sélectivité » et « recentrage » seront les mots d’ordre chez Engie pour les mois à venir. L’énergéticien français examine un plan de cession d’actifs ambitieux, qui a été soumis au conseil d’administration. Selon nos informations, le projet porte sur des activités de services employant plus de 15.000 personnes (le groupe compte 170.000 salariés au total) et un chiffre d’affaires qui serait compris entre 1,2 et 1,8 milliard d’euros, soit 2 % à 3 % des revenus d’Engie.

« Il est à ce stade prématuré d’envisager le nombre de salariés qui pourraient être concernés par la mise en oeuvre de ces plans d’actions, a néanmoins déclaré le groupe mercredi. Il est en outre clair qu’il s’agira dans la plupart des cas de cessions, sans impact direct sur l’emploi ».

Sortir de 25 pays

Il s’agit là de la première vague d’un programme de cessions d’actifs pour un montant de quatre milliards d’euros qui s’étale jusqu’en 2022, annoncé par le président du groupe Jean-Pierre Clamadieu en février, au lendemain du départ de la directrice générale, Isabelle Kocher .

Le groupe compte finaliser cette première étape d’ici l’an prochain, mais le calendrier est susceptible d’être décalé en raison de la crise du COVID-19 qui compromet de nombreuses opérations financières. « Il est évident qu’on ne pourra pas faire grand-chose dans les deux ou trois mois qui viennent », explique une source au fait du dossier.

Engie compte d’abord quitter quelque 25 pays (sur un total de 70) où sa présence est considérée comme insuffisante. Cet objectif a été officiellement annoncé par le groupe mardi , mais la liste des pays en question n’a pas été dévoilée. Selon nos informations, l’Algérie, la Côte d’Ivoire, la Croatie, la Grèce, la Norvège ou encore l’Argentine sont concernés. Ils représentent en tout moins de 30 millions d’euros de chiffre d’affaires et emploient 1.400 personnes. Engie attend une centaine de millions d’euros de ces cessions, dont certaines sont déjà en cours.

Gestion des musées, élagage des arbres…

Au-delà de ce recentrage géographique, Engie prépare sa sortie d’une kyrielle d’activités de services qui ne sont pas considérées comme stratégiques et pas assez rentables. Certaines sont importantes, comme Endel, spécialiste de la maintenance des sites industriels et des centrales nucléaires. Cette société basée en France emploie environ 6.000 personnes. « Nous tombons des nues, réagit Stéphane Caffier, délégué CFDT chez Endel. Nous avons tout de suite demandé un rendez-vous avec la direction ».

Engie veut aussi « sortir » de métiers sans rapport avec l’énergie comme la gestion des musées, la logistique pour le secteur de la défense, l’élagage des arbres ou encore la télésurveillance et la gestion de prisons. A l’étranger, la vente d’une filiale de télécoms au Chili est déjà en cours.

« Grande braderie »

« Il s’agit d’activités très dispersées qui se situent à la périphérie du groupe et qui dégagent très peu ou pas de résultats, poursuit la même source. Cela représente beaucoup de salariés, certes, mais il n’est pas question de les supprimer, seulement de leur trouver de meilleurs propriétaires ». Le montant des cessions est difficile à évaluer à ce stade. Elles pourraient représenter au total entre un et deux milliards d’euros.

Le projet commence à fuiter en interne et les syndicats demandent à la direction de s’expliquer. La CGT dénonce « une grande braderie » et prévient du danger d’un « détricotage » de la branche services, dont les différents métiers « se complètent » selon elle. « Il est inacceptable qu’un Groupe comme Engie, qui est loin d’être dans le rouge, décide pour des raisons purement financières d’amélioration de la rentabilité à court terme, de se débarrasser de milliers de salariés », poursuit le syndicat.

Soutien de l’Etat-actionnaire

« Si les cessions ne peuvent être réalisées dans de bonnes conditions, elles risquent de se traduire par des suppressions de postes, estime Gildas Gouvazé (FO). Il est surprenant que Jean-Pierre Clamadieu prenne des décisions aussi importantes alors que nous n’avons pas de directeur général, avec le soutien du conseil d’administration où siègent des représentants de l’Etat-actionnaire ». Claire Waysand, la directrice générale par intérim, a précisé mardi que les cessions envisagées feraient l’objet de « discussions avec les partenaires sociaux ».

Coronavirus : CMA CGM sécurise sa trésorerie par un prêt de 1 milliard d'euros garanti par l'Etat, Crédits

Ce n’est pas tant le coup de tabac, somme toute limité, que la pandémie de Covid-19 a d’ores et déjà fait subir au transport maritime de marchandises, que celui qui pourrait s’abattre dans les prochaines semaines qui a conduit CMA CGM à demander un
prêt garanti par l’Etat
(PGE), et à l’obtenir. Le géant français des navires porte-conteneurs annonce ce mercredi matin par un communiqué « la signature d’un prêt de 1,05 milliard d’euros auprès d’un syndicat composé de trois banques, BNP Paribas, HSBC et Société Générale (son pool bancaire historique, NDLR). »

Filet de sécurité

Garanti à hauteur de 70 % par l’Etat, qui détient 7 % du capital de l’armateur marseillais par le biais d’une participation de la Bpi, « ce prêt a une échéance initiale d’un an avec une option d’extension jusqu’à cinq années additionnelles », précise le groupe. Contrairement au dispositif mis en place pour
soutenir Air France-KLM
, autrement affecté par la quasi-mise à l’arrêt du transport aérien, l’Etat français n’apporte aucune aide directe à CMA CGM.

Ce nouveau financement est « une ligne de précaution, un filet de sécurité plutôt qu’une impérieuse nécessité », commente un bon connaisseur du dossier. Il doit permettre au groupe de transport et de logistique de continuer à renforcer sa trésorerie, voir de se substituer, le cas échéant à d’autres financements afin d’alléger la maturité de sa dette.

Incertitudes

De fait, à ce stade, CMA CGM prévoit à court terme un ralentissement limité de son activité, avec une baisse des volumes du marché estimée à environ 10 % entre le premier semestre 2019 et le premier semestre 2020. Le numéro un mondial du secteur, le Danois Maersk s’avère, lui, plus alarmiste. Il a annoncé ce mercredi s’attendre à une baisse de quelque 25 % de ses volumes au deuxième trimestre, rapporte l’agence Bloomberg. D’ores et déjà, les armateurs se sont adaptés par des
allègements de services
de grande capacité, parfois suspendus dans leur totalité au deuxième trimestre. Le cabinet d’études spécialisé dans le maritime Alphaliner extrapole même que « jusqu’à 30 % de la capacité totale seront retirées des routes les plus touchées par la baisse des volumes ».

C’est donc pour faire face à ces incertitudes sur la conjoncture mondiale nées de la crise sanitaire et des mesures de confinement dans un grand nombre de pays que CMA CGM a fait appel à un PGE. « Je tiens à remercier les autorités françaises d’avoir mis en place un tel dispositif, efficace et rapide. Ce prêt démontre également la confiance de nos banques dans le modèle économique et la stratégie du groupe », a déclaré le PDG de CMA CGM, Rodolphe Saadé, cité dans le communiqué.

À noter

CMA CGM exploite une flotte de 502 navires qui desservent plus de 420 ports dans le monde, et ont transporté près de 22 millions de conteneurs EVP (Equivalent Vingt Pieds). Sa filiale CEVA, acteur mondial de la logistique, transporte chaque année plus de 500.000 tonnes de fret aérien et 1,9 million de tonnes de fret terrestre