Menu

Une de Entrepreneur France

Les marques en quête de « bénévolence », Branding

Les marques en quête de « bénévolence », Branding

Il est rare qu’un mot médiéval soit remis au goût du jour, surtout dans l’univers du marketing. C’est pourtant le cas avec la « bénévolence » mise en avant par l’institut BVA et l’agence de publicité Change. 

La « bénévolence » est « la capacité des marques à être vigilantes aux autres et au monde ». Un synonyme de bienveillance, avec une dimension moins passive et orientée sur la volonté de faire le bien. Pour Patrick Mercier, président fondateur de Change, la bénévolence, c’est même plus précisément, « la capacité des marques à être empathiques dans le quotidien du consommateur, au-delà des grandes déclarations. » Ce sont, souligne-t-il encore, « des actes en plus des mots ». Le concept, qui trouve tout son sens dans la période de crise sanitaire actuelle, fait l’objet d’une mesure récurrente annuelle auprès de 5.000 personnes, sur 125 marques différentes.

Levier de préférence

Depuis quelques années, on a vu se multiplier les démarches des entreprises et de leurs agences pour s’engager dans le sociétal et l’éthique via la responsabilité sociale et environnementale. Puis, les marques ont éprouvé 
le besoin d’écrire leur « raison d’être ».
Et – comme souvent dans ce genre de comportement grégaire – tout le monde s’est mis à dire plus ou moins la même chose. Dans ce concert des bonnes âmes que la crise risque d’accentuer, la bénévolence a le mérite de ne pas se présenter comme une démarche obligatoire. Il s’agit uniquement, et modestement, d’un indicateur de l’image de bienveillance des marques en vue d’obtenir un « levier de préférence ».

Certaines obtiennent un très bon score : Ikea, Décathlon, Yves Rocher ou Bonduelle sont véritablement perçues comme utiles au quotidien, empathiques et responsables. D’autres utilisent des leviers de préférence différents tels que l’humour, le leadership, le bas prix, comme Burger King, Coca-Cola ou Easy Jet.

Elles ne s’en portent pas plus mal. Car si toute entreprise a aujourd’hui
l’obligation de réfléchir à son rôle sociétal et au sens de sa mission
, toute marque n’a pas l’obligation de cocher toutes les cases pour son image éthique et sociétale. Pour être aimée et préférée, 
chaque marque choisit encore son registre de séduction dans une large palette
au-delà du conformisme ambiant. L’indice de bénévolence est une note parmi d’autres, qui mesure si une marque est « une bonne élève » ou pas, en la matière. Cela n’empêchera pas les marques de continuer à être disruptives.

Gilles Fraysse est conseil en valeur de marque au sein du 
cabinet Happy Match

@fraysse_y @HAPPYMATCH1

Coronavirus : épisode n° 6, partager le leadership, Idées

Coronavirus : épisode n° 6, partager le leadership, Idées

Un second souffle ? La psyché continue de se modifier… Après le choc puis l’élan de solidarité, après les rêves, les craintes les plus extrêmes, puis les doutes et la fatigue, l’annonce de la sortie du tunnel laisse entrevoir l’idée d’une nouvelle ligne de départ. Mais il est d’ores et déjà entériné que ce nouveau départ sera lent, progressif, hétérogène car encadré. L’occasion sans doute de faire un premier bilan et de rassembler de nouvelles forces pour les dirigeants comme pour tout un chacun.

De la simplicité à la complexité

Comme une mer qui se retire, le confinement commence à révéler au grand jour les traces qu’il laisse. Longtemps masqué par l’évidente prééminence de sauver des vies, l’inventaire des conséquences de la « distanciation sociale » fait apparaître une image plus contrastée. Qualité des liens dans les foyers, sens de la vie, capacité à rester seul, relation au monde, connexion à la nature… Combien de vies ont été éprouvées ? Combien ont été abîmées ? Mettre en balance ces vies-là avec celles annoncées comme sauvées ou perdues est extrêmement délicat. Comment prendre en compte les blessures des « survivants » après des semaines de comptabilisation binaire des « sauvés » et des « décès » ?  Nous relevons d’ailleurs de plus en plus l’emploi du terme « trauma » . Comment « évaluer » la situation réelle ? Peut-on se contenter de « noir et blanc » pour se faire une idée d’une image avec manifestement autant de niveaux de gris ? Beaucoup de dirigeants éprouvent le besoin de développer une plus grande finesse d’appréciation de la situation et d’apprendre à la partager aussi avec le plus grand nombre.

Car l’enjeu essentiel du redémarrage, qui préoccupe les dirigeants, est la cohésion de leurs équipes et la cohésion sociale en général. Les recréer nécessitera sans doute de rapprocher les regards avant d’agir. Comment tirer ensemble les enseignements de ce qui s’est passé pour y puiser les germes de ce qu’il faudrait faire grandir ? Comment prendre le temps d’apprendre des retours d’expérience avec un état d’esprit d’ouverture, dépourvu d’ego ? Comment désapprendre et abandonner certaines certitudes – sur soi, sur les autres, sur ce qui est important ou vrai –  qui contraignaient nos raisonnements et réflexes  « d’avant » ?

Projet collectif

Un tel mouvement est-il possible dans le climat qui s’installe ? Des dirigeants observent autour d’eux combien le niveau de peur ambiant paralyse les esprits – stupéfaits par la nouveauté et l’ampleur de la crise – et les initiatives, inhibées par une aversion accrue au risque. Confrontés au dilemme opposant le risque sanitaire au risque économique, ils perçoivent combien l’exacerbation du premier a occulté le deuxième. La brutalité de la récession risque d’entraîner de la précarisation, mais aussi leur remise en cause.

Sans prise de recul, beaucoup de personnes mues par la peur – quel que soit leur âge ou leur classe sociale – sont inconsciemment poussées à définir leurs objectifs en termes de « survie » – qui de son statut, qui de sa subsistance économique, qui de son existence physique – tandis que  d’autres se sont révélées par leur courage, ténacité, générosité . Comment dans ce cadre bâtir un projet collectif ? Les dirigeants qui prennent pleinement la mesure de cette situation savent qu’il leur incombe d’agir. C’est, au fond, la responsabilité qu’ils ont acceptée. Leur enjeu consiste, dans un premier temps, à convertir la peur sclérosante en désir de coresponsabilité, ce qui suppose qu’ils acceptent aussi les conséquences de ce partage. Grâce au langage de vérité, au courage, à la lucidité, ce désir peut se muer en espoir.

Dans certaines entreprises, particulièrement dans les PME, des forces nouvelles émergent. Leurs dirigeants développent la responsabilité et favorisent l’autonomie, porteuse d’initiatives. Présent depuis longtemps dans les entreprises, le thème de l’autonomisation semble plus que jamais d’actualité  pour tant d’organisations, jusqu’à celles au sommet de la société. Et si les meilleures solutions pour demain étaient déjà en gestation au plus près du terrain ?

Un rendez-vous hebdomadaire

 

Le cabinet Egon Zehnder témoigne et tire des enseignements, en termes de leadership, de la crise sanitaire provoquée par le coronavirus.

 

Depuis six semaines, les échanges de l’équipe française de l’acteur mondial de la chasse de têtes avec ses interlocuteurs ont été plus nombreux, plus essentiels, plus intenses que jamais. Elle a donc eu l’idée de rédiger son « journal de bord ».

 

Le rendez-vous est hebdomadaire, depuis le 25 mars, et est relayé en exclusivité par « Les Echos Executives » :

 

Coronavirus : épisode n° 1, être à l’écoute de ce qui nous traverse
Coronavirus : épisode n° 2, se sentir relié
Coronavirus : épisode n° 3, relever la tête
Coronavirus : épisode n° 4, prendre l’initiative
Coronavirus : épisode n° 5, créer un mouvement

 

Coronavirus et confinement : les bonnes pratiques RH à retenir, Bien-être au travail

Coronavirus et confinement : les bonnes pratiques RH à retenir, Bien-être au travail

Les responsables des ressources humaines ont dû faire preuve de souplesse pour faire face  au défi sans précédent du confinement . L’obligation de  santé et de sécurité des salariés a pris tout son sens à la lumière du risque sanitaire évident, mais la transformation est plus profonde et large. « Il leur a été demandé d’assurer la continuité de l’activité et ils l’ont fait », souligne Audrey Richard, présidente de l’Association nationale des DRH (ANDRH).

Repenser l’organisation des services

En lien étroit avec la direction générale, ils ont, non sans mal, élaboré un  plan de continuité d’activité , fait le point sur les collaborateurs susceptibles de pouvoir télétravailler et ceux dispensés d’activité. « Nous sommes intervenus sur un sujet très technique » reconnaît Claire Dugueil, DRH du groupe d’agences de voyages Evaneos, elle-même au chômage partiel comme l’ensemble du comité de direction. Forte de l’expérience de ses collaborateurs italiens, la direction générale du voyagiste savait que la situation allait durer. Un plan de solidarité a d’abord été lancé afin que des solutions soient trouvées entre services. Une fois l’entreprise confinée avec plus aucun départ de France possible, le  chômage partiel s’est avéré être la seule solution. « Nous avons complètement repensé l’organisation des équipes, nos besoins et nos moyens ne sont plus les mêmes qu’avant la crise », explique Claire Dugueil. Le plan d’activité partielle a été mis en oeuvre fin mars, une fois le pic de crise dû aux rapatriements et aux annulations de voyages passé. En quatre semaines, Evaneos est passé du statut d’une entreprise qui avait besoin de recruter une vingtaine de personnes à une organisation réduite à 30 % de son activité.

Du côté de la Macif, le choix a été fait de ne recourir ni aux  aides d’états ni au chômage partiel. « Nous avons décidé de maintenir les salaires de l’ensemble de nos collaborateurs et de ne pas faire appel au dispositif d’activité partielle dans un souci de cohérence avec nos valeurs de solidarité », témoigne la DRH du groupe, Valérie Sclavon-Perronnet. Considérée par le gouvernement comme faisant partie d’un secteur d’activité prioritaire, l’entreprise a pourtant décidé de fermer ses agences afin de préserver les salariés recevant le public puis, le 17 mars, tous ses autres sites tels que les centres d’appel et le siège social. De son côté, Engie a tenu un raisonnement similaire. Après avoir fait le point sur les équipes dont le groupe avait besoin pour tenir ses obligations de service public, 55.000 salariés ont été mis au  télétravail et 14 % des effectifs au chômage partiel, principalement ceux sur le terrain dont l’activité est totalement à l’arrêt.

Faire du télétravail la norme, en veillant à la… déconnexion

Jusque-là encore largement encadré par des accords de branche ou d’entreprise, le  télétravail est de fait devenu la norme . Solution alternative pour continuer l’activité, il impose de laisser place à une certaine autonomie des collaborateurs tout en veillant au risque de  burn-out . « La tension est constante pour maintenir le collectif, ne pas sur ou sous-solliciter les collaborateurs. Un bon dosage est à trouver », confirme Claire Degueil. Les responsables RH sont là encore en première ligne aux côtés des managers, « véritables courroies de transmission » pour s’assurer du bien-être de leurs salariés . Dans certaines entreprises, ils prennent l’initiative d’appeler les personnes en chômage partiel afin de garder un lien, les assurer du collectif et leur proposer une aide psychologique.

Chez Engie, une enquête est réalisée deux fois par mois auprès des collaborateurs afin de connaître leur état d’esprit et les  médecins du travail se tiennent à leur disposition si besoin. Dès le 14 mars, la Macif – dont 60 % des salariés sont en télétravail – a mis en place un numéro vert tenu par les collaborateurs RH pour répondre aux questions administratives. La cellule d’entraide qui existait déjà a été complétée par un dispositif de soutien scolaire aux enfants. « Quand bien même ces dispositifs sont orchestrés par la DRH, tout ce qui est dit est anonyme. Nous avons uniquement connaissance des sujets abordés, avec une vigilance particulière sur les risques de violences et d’addictions », précise Valérie Sclavon-Perronnet.

Rendre le dialogue social transparent et régulier

En plus du soutien du collectif et de déploiement du chômage partiel, les DRH doivent maintenant réfléchir, aux côtés des directions financière et générale, à un plan de déconfinement. Dans cette phase, les  partenaires sociaux ont un rôle important à jouer. « Le dialogue social est nettement plus soutenu et plus transparent. Il est quasiment quotidien, les calendriers ont été bousculés et pour autant les solutions ont été trouvées collectivement », reconnaît la présidente de l’ANDRH.

Au-delà de leurs rôles de vigies sur la santé et la sécurité, allant parfois jusqu’à saisir le juge lorsqu’ils estiment que la situation l’exige comme chez  Amazon , ils sont aussi de précieux relais des préoccupations des salariés. « Nous avons mis en place un dispositif à l’échelle du secrétariat du comité européen pour apporter un point complet régulier. Aucune décision n’a été engagée sans concertation et sans débat », déclare Pierre Deheunynck, directeur général adjoint en charge des RH d’Engie. Comme dans d’autres entreprises, l’énergéticien réfléchit à plusieurs scénarios. Il est d’ores et déjà acté que les 4.500 salariés présents dans la Tour 1 du quartier de La Défense à Paris ne reviendront pas tous le 11 mai. Seuls 20 ou 30 % des effectifs se présenteront. D’ici là, il faudra organiser les flux de circulation dans les ascenseurs, les open spaces, les salles de réunion, le restaurant d’entreprise, etc. « Le télétravail restera une solution sur laquelle nous capitaliserons », indique Pierre Deheunynck.

A peine le chantier du confinement est-il à l’équilibre qu’il est maintenant temps, pour les  DRH, de s’atteler à un nouveau, cette fois, sur le long terme .

« La crise du Covid-19 permet aux DSI d'acquérir leurs lettres de noblesse », Profils

« La crise du Covid-19 permet aux DSI d'acquérir leurs lettres de noblesse », Profils

A la faveur de cette crise, les DSI ont-ils enfin pu prouver leur rôle stratégique ?

De l’avis de tous mes collègues, nous avons gagné, auprès de la direction générale, cette visibilité et ces lettres de noblesse que nous espérions depuis longtemps, même si tous ne les ont pas encore obtenues. Chacun a pris conscience que c’est bien grâce au numérique que la continuité de l’activité peut avoir lieu. En plus d’avoir un effet accélérateur sur l’appropriation des outils collaboratifs ou vidéos par les dirigeants, la crise que nous traversons démontre que les investissements réalisés, ces dernières années, n’ont pas été vains et ont permis une mise en place très rapide du télétravail. En la matière, plus rien ne sera jamais comme avant car le recours massif à ce mode de travail à distance, qui semblait inimaginable dans beaucoup de fonctions, 
s’est bel et bien produit
.

Ne donne-t-il pas quelques sueurs froides au DSI que vous êtes ?

Dans l’urgence, nous avons dû faire quelques compromis pour ouvrir cette possibilité aux salariés tout en garantissant un maximum de sécurité, mais, très rapidement, chacun a pu bénéficier d’une connexion entièrement sécurisée. Pour cela, les équipes informatiques ont dû fournir, en très peu de temps, un ordinateur portable à ceux qui n’en avaient pas – en passant quelques commandes ou en recyclant d’anciens modèles -, augmenter le nombre d’accès au VPN, mais aussi offrir un support aux utilisateurs désormais à l’extérieur. Le tout en espérant que les infrastructures télécoms tiennent le choc, ce qui a été rendu possible par le travail des opérateurs français.

Comme toute période de crise, celle-ci est propice aux cyberattaques, point de vigilance particulier pour les DSI…

Même si nous ne disposons pas de données quantitatives, nous observons, comme dans toute situation exceptionnelle, une recrudescence des formes d’attaques classiques – fraude au faux virement, ransomware, etc. -, mais aussi l’émergence de nouvelles formes qui prétextent une urgence sanitaire ou promettent de fournir des produits en rupture de stock, comme des masques. Ce phénomène n’est que l’amplification de ce que nous constatons depuis deux ans, avec un nombre très important d’attaques qui, pour certaines, réussissent. C’est évidemment 
un point de vigilance accrue
qui suppose une surveillance stricte via le Security Operations Center (SOC), un rappel 
des règles d’hygiène numérique
à l’ensemble des salariés et des équipes sécurité toujours sur le pied de guerre.

Le déconfinement va nous confronter 
à deux défis majeurs
. D’une part, protéger la santé des équipes informatiques en instaurant les mesures sanitaires adéquates, avec une organisation de l’espace de travail assez différente ; d’autre part, gérer le mode de travail hybride qui va, dans beaucoup d’entreprises, se mettre en place. Aujourd’hui, le télétravail fonctionne car tout le monde est en télétravail, mais, à partir du moment où certains seront au bureau et d’autres à domicile, l’organisation risque d’être plus complexe.

Dans tous les cas, cette période de confinement aura un impact certain sur l’après, que ce soit en matière de télétravail, d’appropriation des outils de vidéoconférence, mais aussi de dématérialisation de certains processus. Elle aura aussi prouvé 
qu’il faut faire confiance aux équipes
et que, même en période de crise, elles sont très résilientes et capables d’innover pour trouver des solutions par elles-mêmes.

Covid-19 : comment la dématérialisation dope la résilience de Butagaz, Achats

Covid-19 : comment la dématérialisation dope la résilience de Butagaz, Achats

Des envois postaux 
réduits à la portion congrue
, personne dans les bureaux pour ouvrir le courrier et récupérer les factures ou les chèques… La situation est actuellement très difficile pour les entreprises qui ne s’étaient pas encore engagées sur le chemin de la digitalisation, tant côté clients que côté fournisseurs. Nicolas Rousseaux, chef de projet IT de Butagaz, avait heureusement pris les devants il y a un an, en mettant en place un processus digitalisé 
de traitement de ses factures fournisseurs
, avec l’éditeur Esker.

Le projet est né, tout d’abord, d’une incitation de la maison mère, le groupe irlandais DCC. « Le groupe est très avancé en matière de digitalisation. Il nous a demandé d’avoir des actions en ce sens, explique Nicolas Rousseaux, qui a mené le projet, en lien avec la direction comptable et financière du fournisseur d’énergie. L’idée est de mener toute une vague de dématérialisation : nous sommes déjà équipés depuis longtemps côté clients, mais il nous restait les contrats fournisseurs, les flux achats, etc. Nous avons choisi de commencer par la fin et de remonter la chaîne : c’était plus simple et plus logique. Ainsi nous avons commencé par la dématérialisation de nos factures fournisseurs, un process bien rodé aujourd’hui et qui permet de dégager rapidement un retour sur investissement. »

Gain de temps

Le projet a été l’occasion de revoir l’ensemble du process achat chez Butagaz. « Alors qu’auparavant, nous recevions beaucoup de factures sans commande, il est désormais obligatoire de passer une commande en amont : elle est nécessaire pour que le système puisse rapprocher facture et commande. Nous avons beaucoup gagné en sécurisation, mais aussi dans la piste d’audit, qui peut désormais être suivie de façon très claire : pour chaque facture, on sait quelles sont les personnes qui sont intervenues, qui a validé, etc. », détaille Nicolas Rousseaux.

Il y a encore deux ans, le service comptabilité fournisseurs du groupe traitait manuellement quelque 20.000 factures par an. En supprimant la gestion des factures papier reçues par La Poste, les équipes ont gagné environ deux heures par jour, un temps qui a pu être affecté à 
des tâches à plus haute valeur ajoutée
. Mais la digitalisation a aussi permis de réduire les pertes de factures, les doubles règlements, ou encore le temps passé sur les relances de validation internes.

Suivi simplifié

Enfin, le suivi de l’activité est aujourd’hui beaucoup plus simple : « La responsable de la comptabilité fournisseurs dispose désormais d’un tableau de bord pour suivre les flux de factures, les documents en attente de validation, ou encore les délais moyens de paiement. Avant, il fallait plutôt jauger à la hauteur de la pile à traiter ! », assure Nicolas Rousseaux. Se débarrasser du papier n’a toutefois pas été simple pour tout le monde. « Certains ont eu du mal à ne plus conserver les factures papier : il a fallu leur démontrer que si les documents sont correctement numérisés et archivés, leur authentification est garantie et ce n’est plus la peine de garder les originaux. »

Un an après la mise en place du projet ? Environ 80 % des factures reçues sont digitalisées. « La montée en charge s’est faite progressivement. Nous n’avons pas fait de communication de masse sur le sujet mais, à chaque nouveau contrat ou commande, nous expliquons notre nouveau process aux fournisseurs. La prise en main de l’outil est très facile pour les intermédiaires », précise Nicolas Rousseaux. L’objectif était d’atteindre 90 % d’ici la fin de l’année 2020 mais, de facto, avec la crise du Covid-19, seules les factures digitales peuvent être traitées. Les autres ? Elles attendent dans leurs enveloppes que quelqu’un passe les chercher.

La DRH de Nespresso France : « Il importe désormais de recréer un lien de proximité », Conduite du changement

La DRH de Nespresso France : « Il importe désormais de recréer un lien de proximité », Conduite du changement

A quoi ressemblent vos journées en cette septième semaine de confinement ? 

Cette crise génère de nombreuses sollicitations pour les équipes des ressources humaines. Notre rôle est de protéger, de rassurer et d’expliquer. Chaque matin, de 9 heures à 9 heures 30, je prends un café virtuel avec mes collaborateurs. L’objectif de ce rendez-vous quotidien est de maintenir le lien, de porter attention à l’autre , de prendre des nouvelles, de s’enquérir de l’organisation de chacun, pas de prioriser le business. Quotidiennement aussi, le comité de direction se réunit en visioconférence pour piloter au mieux la gestion de crise. Ensuite,  je m’attache à diffuser une information claire et rassurante à l’ensemble des salariés.

Avez-vous anticipé l’ampleur de cette vague ?

Dès fin février, nous avons pris des mesures pour faire de la prévention, diffuser des informations, rappeler les gestes barrières, mettre du gel hydroalcoolique à la disposition des collaborateurs – dans les boutiques, au sein des forces de ventes, dans le centre de relation client et au siège -, limiter (puis annuler) les déplacements à l’étranger et en France… Le vendredi 13 mars au soir, nous avons invité les équipes du siège à emporter leurs équipements. Et le 14 au soir, nos managers ont informé les équipes que les boutiques fermaient et que tout le monde devait rester chez soi. Enfin, très rapidement, nous avons mis en place un plan de continuité d’activité.

Oui, car nous avons signé, il y a deux ans, un accord prévoyant le télétravail deux jours par semaine. Nous avons toutefois rappelé  les règles du travail à distance , les horaires, la nécessité de faire des pauses, etc. A l’annonce du confinement, l’ensemble du centre de relation client a également été mis en télétravail, ce qui a nécessité 48 heures, pour pouvoir équiper tous les collaborateurs. Par ailleurs, nous avons prévu des aménagements au cas par cas, et autorisé ceux qui logent à l’étroit de choisir un autre lieu de confinement, à condition qu’une connexion Internet soit possible et qu’un retour soit envisageable dans des délais restreints.

Comment travaillez-vous au quotidien avec la direction générale et les salariés ? 

Cette situation inédite suscite des interrogations : comment gérer les objectifs pour les forces commerciales ? Quels impacts sur les rémunérations variables, les congés, les situations d’inactivité, l’enregistrement des heures de travail, les effets concrets des derniers décret ? Nous faisons d’importants efforts de clarté. Nous avons, par exemple, conçu une « foire aux questions exhaustive » et  des conférences téléphoniques régulières avec nos managers  permettent de faire remonter les questions qui émanent du terrain. Pour diffuser ces informations, nous avons recours aux e-mails et à Workplace.

Les membres du comité de direction travaillent quotidiennement ensemble, en premier lieu pour gérer les situations à très court terme, puis progressivement s’atteler aux conditions de reprise. Nous favorisons aussi la proximité avec la communauté des managers en les « réunissant » virtuellement toutes les trois semaines afin de les informer sur l’ensemble des actions mises en place et leur donner, en temps voulu, les éléments d’information relatifs aux conditions de reprise d’activité. 

Pour les télétravailleurs, nous avons créé une newsletter hebdomadaire qui dispense des conseils pragmatiques sur diverses thématiques :  la santé, les bonnes pratiques du télétravail, le « prendre soin de soi » et ainsi qu’une rubrique dédiée à la conciliation du télétravail et la garde d’enfants.

Les formations en présentiel ont été annulées, les séminaires reportés et nos feuilles de route vont être adaptées. Lorsque notre activité reprendra, nous allons évidemment prioriser et traiter le plus urgent : l’objectif n’est pas de concentrer en une semaine ce qui était prévu sur un mois. Nous travaillons à différentes hypothèses pour la reprise de nos activités, en tenant compte des recommandations du groupe, et bien sûr des précisions gouvernementales à venir.

Surtout, le retour au travail devra être accompagné , il va s’agir de récréer un lien de proximité. Chez Nespresso, nous misons sur la bienveillance. Nos collaborateurs démontrent en permanence non seulement un incroyable engagement pour Nespresso France, mais aussi un esprit d’équipe et de l’agilité.J’espère que l’après continuera en ce sens. Leur attente de reprendre leur activité est d’ores et déjà forte. 

Chiffres clés de Nespresso France

 

Effectifs : près de 1.500 collaborateurs.

 

Moyenne d’âge : 32 ans (plus de 20% des salariés ont moins de 26 ans).

 

Entre 700 et 800 employés travaillent en boutique.

 

Au jour le jour, le coronavirus impose de nouvelles règles du jeu aux organisations, Organisation des entreprises

Au jour le jour, le coronavirus impose de nouvelles règles du jeu aux organisations, Organisation des entreprises

Avec le tsunami sanitaire, un leitmotiv est revenu dans de nombreuses entreprises : « People first ! », ont proclamé grands groupes et PME. La santé et la situation en emploi des collaborateurs se sont, de fait, imposées comme les premiers dossiers à traiter. Puis, très vite, sont venus ceux de la trésorerie, voire de l’activité même, avec réaiguillage des opérations et/ou reprise dégradée. Le point sur ce qui a été mis en place.

Santé et sécurité : renforcer les dispositifs

La pandémie de Covid-19 a remis au coeur des entreprises l’impérieuse nécessité de prendre soin de ses salariés, au-delà de l’
obligation d’assurer la sécurité et la santé imposée par le Code du travail
. « La tension est constante pour maintenir le collectif, ne pas sur ou sous-solliciter les collaborateurs. Un bon dosage est à trouver », confirme Claire Degueil, DRH du voyagiste Evaneos. Le
télétravail
impose de laisser place à une certaine autonomie des collaborateurs tout en veillant au risque de 
burn-out
.

Dès le 14 mars, la Macif – dont 60 % des salariés sont en télétravail – a mis en place un Numéro vert tenu par les collaborateurs RH pour répondre aux questions administratives. La cellule d’assistance sociale et de soutien psychologique qui existait déjà a été complétée par un dispositif de soutien scolaire aux enfants. « Quand bien même ces dispositifs sont orchestrés par la DRH, tout ce qui est dit est anonyme. Nous avons uniquement connaissance des sujets abordés, avec une vigilance particulière sur les risques de violences et d’addictions », précise Valérie Sclavon-Perronnet, DRH du groupe. Dans d’autres entreprises, les responsables des ressources humaines ont pris l’initiative d’appeler les personnes en chômage partiel afin de garder un lien.

Plan d’activité partielle : s’appuyer sur les managers

A la mi-avril, 
près de 10 millions de salariés étaient au chômage partiel
. En lien étroit avec la direction générale, les DRH ont, non sans mal, élaboré un plan d’activité partielle, fait le point sur les collaborateurs susceptibles de pouvoir télétravailler et ceux dispensés d’activité. « Il leur a été demandé d’assurer la continuité de l’activité et ils l’ont fait », se réjouit Audrey Richard, présidente de l’Association nationales des DRH (ANDRH). Les managers se sont aussi avérés être de précieuses courroies de transmission pour faire comprendre les choix.

Chez Evaneos, décision a d’abord été prise de lancer un plan de solidarité entre les 200 salariés, mais une fois l’entreprise confinée, avec plus aucun départ de France possible, le chômage partiel est devenu la seule solution. « Nous sommes intervenus sur un sujet très technique » reconnaît Claire Degueil, elle-même en activité partielle comme l’ensemble du comité de direction. En quatre semaines, le voyagiste est passé du statut d’entreprise qui avait besoin de recruter une vingtaine de personnes à celui d’organisation réduite à 30 % de son activité.

Réduire les dépenses et trouver de nouveaux financements

Qu’elles puissent maintenir, ou non, tout ou partie de leur activité, les entreprises veillent à 
préserver leur liquidité
. La plupart commencent, d’abord, par tailler dans leurs dépenses. Outre le recours au chômage partiel et au report de charges sociales et fiscales, de nombreuses sociétés, telles LafargeHolcim, Saint-Gobain ou Total, 
réduisent leurs plans d’investissement
« Le manque de visibilité et l’attention particulière accordée à la trésorerie nous ont poussés à mettre en attente certains projets de croissance externe, mais aussi de développement organique », abonde le directeur financier de Claranova, Sébastien Martin.

Et si ces coupes ne suffisent pas, à charge pour les grands argentiers de trouver de nouvelles sources de financement. Si certains, comme Aéroports de Paris, Air Liquide, Bouygues Telecom ou Engie, ont pu se tourner vers les marchés 
pour réaliser des émissions obligataires
qui dépassent, à chaque fois, le milliard d’euros, d’autres ont sollicité leurs banquiers pour tirer sur une ligne de crédit syndiqué ou obtenir un nouvel emprunt. Là, deux choix s’offrent à eux : contracter une dette classique ou négocier un prêt garanti par l’Etat (PGE), 
à l’image de FNAC Darty
ou de Pierre & Vacances.

Dans tous les cas, les directeurs financiers doivent être armés de business plans très solides, fondés sur plusieurs scénarios de reprise pour convaincre les banques, 
parfois réticentes
. En cas de difficultés, le médiateur du crédit de la Banque de France pourrait leur apporter une aide précieuse. « Il est également crucial d’être très transparent avec ses investisseurs pour les rassurer, au cours de road shows virtuels, sur la gestion de la crise, et leur montrer que l’on pense déjà à l’après et aux opportunités qui se dessinent », ajoute Sébastien Martin.

Oser les nouvelles activités et miser sur la collaboration avec l’écosystème

« Le 17 mars, c’est simple, tout s’est arrêté : en 24 heures, les commandes ont chuté de 90 % », raconte Arnaud Barral, le directeur général d’EOL Group, un fabricant de meubles de bureau made in France. Une fois la mise au chômage partiel de 290 des 300 salariés actée et les demandes de financement lancées, « nous nous sommes mis en demeure de trouver de nouveau débouchés pour que l’entreprise continue d’exister », explique le dirigeant. Ce seront des écrans de protection en Plexiglas : « Le 7 avril, ils étaient sur notre chaîne de production adaptée, soit 48 heures après en avoir eu l’idée et dessiné une ébauche. » En quinze jours, 10.000 unités seront produites. Une conduite à retenir dans la tourmente ? « Nous avons pris des risques », analyse le dirigeant. En 24 heures, la Caisse d’Epargne s’est décidée et a passé commande. Le nouveau produit a permis de regagner 15 % d’activité et de remettre au travail une douzaine de salariés volontaires. Aujourd’hui, la PME, qui s’estime encore en sursis, développe un système d’ouverture de porte avec les pieds.

Dans les grands groupes aussi, la direction des opérations s’est faite agile. Michelin, Air Liquide, PSA et autres champions du CAC 40, se sont mis 
à la fabrication de masques
, de respirateurs ou de gel hydroalcoolique. « Il a fallu commander les lignes et choisir les sites dans lesquels serait lancée la production », témoigne l’un de ces COO. Des mises en places inédites, et un état d’esprit : « De la solidarité et de la collaboration intersociétés, parfois même avec des concurrents », confie ce dernier. Une attitude confirmée par Hanna Moukanas, associé d’Oliver Wyman : « Les COO que nous suivons soulignent cette entraide ; ils disent qu’ils partagent avec leurs clients et leurs fournisseurs des éléments qu’ils n’avaient jamais partagés auparavant. » Un directeur des opérations du secteur automobile a ainsi tenu un webinaire avec ses 1.000 principaux fournisseurs, et échangé des informations inédites, y compris dans la répartition de la marge. Objectif : épargner les sous-traitants. Ils seront essentiels à l’heure de la reprise.

Quoique confiné, Pilot prépare déjà la rentrée de septembre, Responsabilité - Assurances

Quoique confiné, Pilot prépare déjà la rentrée de septembre, Responsabilité - Assurances

Situé dans l’un des premiers foyers épidémiques du Covid-19, à Annecy en Haute-Savoie, Pilot Corporation of Europe a disposé d’un court et précieux temps d’avance sur les autres entreprises.

Le comité exécutif – composé du CEO japonais, du vice-président vente et marketing, du responsable (japonais) finance et reporting, du directeur financier Europe, du directeur des opérations, de la directrice des ressources humaines, du directeur de l’information et du general counsel-compliance officer – s’est réuni dès la fin février pour parer la crise à venir. Avant le confinement officiel, les interrogations étaient nombreuses : l’activité allait-elle se poursuivre ? Si oui, comment l’assurer en garantissant 
la santé et la sécurité
des 250 salariés du groupe ?

Les dirigeants ont très vite décidé de fermer le site de production européen de 10.000 mètres carrés d’Allonzier-La-Caille. « Notre première action était de protéger les salariés et d’assurer la sécurité sanitaire », explique Pierre Giraud, general counsel, compliance officer de Pilot Corporation of Europe. Les 
ordonnances du 25 mars et du 20 avril
– posant les cadres du chômage partiel, des congés payés, des mesures sanitaires obligatoires – ont pu apporter des réponses aux questions encore en suspens. « Nous n’avons pas eu besoin de faire appel au dispositif d’aides d’Etat et nous bénéficions en partie du chômage partiel, le temps pour nous d’aménager certains postes de production pour respecter les consignes sanitaires », détaille le general counsel.

Honorer les commandes déjà passées

L’ETI ne fait pas partie 
des secteurs d’activité suspendus pendant le confinement
. Les produits de papeterie peuvent toujours être distribués dans les grandes surfaces, les commerces alimentaires et en e-commerce. « La production a été arrêtée de façon provisoire, mais nous avons maintenu et réorganisé les activités logistiques pour honorer nos commandes, en particulier pour la rentrée des classes 2020 », précise Pierre Giraud. Dès la mi-mars, 
priorité a été donnée à la logistique
(Pilot assure celle de 7 filiales et de 20 distributeurs rien qu’en Europe). Il fallait alors informer les clients européens des conditions et délais de livraison de leurs commandes et demeurer informé des situations locales. « Notre approche ? Compromis avec nos fournisseurs et nos clients et communication permanente », résume le compliance officer. De leur côté, les équipes commerciales ont adapté leurs méthodes : elles ont priorisé les commandes des campagnes promotionnelles et établi un plan de situation journalière de chaque pays. « La transparence est indispensable. Lorsque les clients sont tenus au courant, ils n’entrent pas dans une logique de pénalités de retard. Et les équipes peuvent se concentrer sur les solutions », insiste Pierre Giraud.

Pilot Coporation of Europe n’a donc pas rencontré de blocages majeurs les premières semaines de confinement. L’entreprise dispose d’un stock suffisant pour honorer les commandes courantes et d’une 
trésorerie solide
. Cependant, la prolongation du confinement entraîne un retard conséquent sur l’organisation de la rentrée scolaire 2020. En temps normal, l’entreprise devrait déjà être en train de produire et livrer tous les produits de la rentrée. Les grandes surfaces remplissent leurs rayons dès le printemps.

Un retard impossible à combler

Depuis début avril, tout le travail est d’anticiper la reprise et de reprendre graduellement la production. Les prévisions de commandes et de leur absorption dans les mois à venir sont régulièrement évaluées. L’usine a rouvert pour fabriquer en priorité ses produits best-sellers, les rollers G-2 encre gel et V5 encre liquide. Elle a aussi mis en place des équipes alternées sur la base du volontariat et des plages horaires adaptées afin de respecter les distances sociales imposées. Dans le même temps, elle a fourni du gel hydroalcoolique, des gants, des lunettes de protection aux salariés. Les masques, en revanche, se font toujours attendre.

La 
fermeture des entrepôts d’Amazon
pour quelques jours n’a, pour le moment, pas altéré le business de l’entreprise. Mais tous les regards se tournent vers le Japon, dont 85 % de la production du groupe est issue. Si les quatre usines sur place devaient prochainement fermer, des difficultés d’approvisionnement pourraient alors se faire ressentir. En France, une deuxième vague d’épidémie compromettrait les possibilités d’expédition. Comme partout, le déconfinement va devoir être progressif pour s’avérer efficace.

Covid-19 : comment Faurecia assure sa liquidité, Crédits

Covid-19 : comment Faurecia assure sa liquidité, Crédits

Pour Faurecia, le freinage fut brutal. A la suite des mesures de confinement décidées dans de nombreux pays à travers le monde 
pour tenter d’endiguer la pandémie de Covid-19
, l’équipementier automobile a vu les usines de ses principaux clients, les constructeurs, 
mises à l’arrêt les unes après les autres
. Résultat : « A partir de la mi-mars, nous avions un chiffre d’affaires proche de zéro en Europe, mais aussi aux Amériques, comme cela avait déjà été le cas en Chine au mois de février », constate son directeur financier, Michel Favre. Se pose alors un défi vital, 
celui de la liquidité
, que Faurecia se doit d’assurer.

Afin d’évaluer les multiples impacts de la situation, malgré le manque de visibilité globale, l’équipementier échafaude de nombreux scénarios, y compris les plus sombres, avec, à chaque fois, deux variables : la date d’une potentielle reprise d’activité et la montée, plus ou moins forte, en volume. « Avec une consommation de cash estimée à 1 milliard d’euros au premier semestre, nous avons rapidement acquis la conviction que nous devions accroître notre liquidité pour faire face à toutes les éventualités », explique Michel Favre.

Se tourner vers les banques

Après avoir tiré, pour moitié, sur sa ligne de crédit syndiqué de 1,2 milliard d’euros, le groupe, mis sous surveillance négative par Moody’s 
comme d’autres valeurs du secteur automobile
, décide de se tourner vers les banques 
pour contracter un nouveau prêt
« Deux options s’offraient alors à nous : avoir recours au prêt garanti par l’Etat (PGE) ou monter un club deal », précise le directeur financier qui appelle, lui-même, ses partenaires bancaires pour leur exposer la situation et leur présenter un business plan, construit en fonction des différents scénarios de reprise. « Nous avons finalement opté pour la seconde option, poursuit-il. D’une part car le PGE se fait à coût coûtant, ce qui peut être difficile pour certaines banques ; et d’autre part car nous souhaitions aller le plus vite possible pour nous inscrire dans la limite de risques des banques alors que d’autres secteurs, comme l’aérien et la logistique, sont également très demandeurs. »

En dix jours, l’affaire est conclue et, le 10 avril, Faurecia signe avec quatre de ses banques principales – BNP Paribas, CA-CIB, Société Générale et Natixis – un club deal de 800 millions d’euros. « Avec nos 2,2 milliards d’euros de cash à fin mars, les 600 millions d’euros restants sur notre ligne de crédit syndiqué et cette nouvelle source de financement, nous sommes désormais en mesure de pouvoir faire face à la crise », assure Michel Favre.

Contrôler ses dépenses

D’autant, qu’en parallèle, l’équipementier veille à réduire autant que possible ses dépenses. En plus de 
la mise au chômage partiel de 90 % de ses salariés
, du contrôle strict de la collecte des créances clients et du réajustement de ses stocks, le groupe s’est engagé dans une « gestion rigoureuse » de ses frais de fonctionnement et d’administration, mais aussi de ses dépenses de R&D, et envisage de réduire ses dépenses d’investissement jusqu’à 30 %. « Nous mettons toutefois un point d’honneur à être un bon payeur pour préserver notre tissu fournisseurs car ils seront essentiels au redémarrage de nos activités, ajoute le grand argentier. Nous entretenons un contact très régulier avec eux pour voir comment nous pouvons les aider, en étant le plus transparent possible. »

Car Faurecia a déjà les yeux rivés sur l’après, sur cette reprise qu’il espère la moins lente possible. Déjà, en Europe de l’Est, quelques usines de constructeurs, comme celles de Volkswagen, ont pu partiellement redémarrer. Afin de gagner en visibilité et pouvoir préparer une montée en puissance de sa production dans les meilleures conditions, l’équipementier cultive un lien permanent avec ses clients, du plus haut niveau hiérarchique aux directeurs d’usine en passant par les services achats et commerciaux. « Nous estimons aujourd’hui que la reprise prendra entre trois et six mois minimum, avec l’impact sur les coûts et le cash que cela suppose. Dans tous les cas, nous espérons qu’elle sera rapide pour ne pas avoir à prendre d’autres mesures plus difficiles », conclut Michel Favre.

Le coronavirus génère incertitudes, expérimentations et cygnes noirs en entreprise, Transformation

Le coronavirus génère incertitudes, expérimentations et cygnes noirs en entreprise, Transformation

Avec la pandémie du Covid-19 vient le temps du « Test & Learn » généralisés en entreprise. Aujourd’hui plus que jamais, il s’agit d’y expérimenter des solutions à petite échelle, de les corriger, «d’échouer encore, d’échouer mieux», dirait Beckett, d’apprendre, de recommencer pour ensuite pouvoir agir en fonction des résultats obtenus. Autrement dit, de diriger avec des peut-être et moults hypothèses, de communiquer de façon constante sans pour autant être toujours en mesure de fournir des réponses précises et de faire preuve de transparence sans entamer le moral des équipes. A n’en pas douter, l’heure reste aux défis quotidiens, à commencer par celui du retour progressif sur le lieu de travail dont le rythme et les modalités demeurent encore, pour beaucoup, inconnus. Les réunions physiques à plusieurs et 
les voyages d’affaires
 devront attendre. 

Faire évoluer les modes de travail 

Les premières précautions sanitaires prises, le télétravail et diverses mesures RH, dont le chômage partiel, enclenchées, les organisations ont désormais compris qu’il leur fallait tout à la fois faire évoluer leurs modes de travail, accélérer leur transformation numérique, affiner leur pilotage financier et mettre le cap sur 
la robustesse de leurs chaînes logistiques
 pour en anticiper les défaillances et ne plus gaspiller les énergies internes à en répertorier les fragilités. Sans compter cet impératif : intégrer, dans tous les raisonnements, la variable «incertitudes».

Prédictibilité impossible 

Justement, dans une série de webinaires consacrés au leadership par temps de pandémie, la London Business Schools se fait fort de distinguer les incertitudes connues (risques de change, défauts d’approvisionnement, etc.), que des compagnies d’assurances peuvent couvrir, des autres événements – 
les «unknown unknowns» issues de la théorie du cygne noir
– incroyables, imaginables, mais dont la prédictibilité est impossible  à fixer. 

Aux méthodes d’expérimentation constante vient donc désormais s’ajouter la nécessité, pour l’entreprise, d’imaginer d’autres effets papillon et scénarios du pire pour préparer les leaders à gérer la survenue de chocs aussi violents, voire plus, que celui de l’actuel coronavirus. Et prendre, aux moments opportuns, les décisions les plus judicieuses sur la triple base de leurs connaissances, expériences et qualités personnelles. Pas une sinécure.