Menu

Jean-Michel Goudard, géant de la pub, est mort, Success Story

Jean-Michel Goudard, géant de la pub, est mort, Success Story

Il était le « G » de RSCG, l’agence de publicité qu’il avait créé en 1976 aux côtés de Bernard Roux, de Jacques Séguéla et d’Alain Cayzac. Le communiquant Jean-Michel Goudard s’est éteint vendredi 6 novembre, à l’hôpital américain, quelques jours avant son 81e anniversaire.

Ce proche de Nicolas Sarkozy a travaillé sur les slogans de campagne « Ensemble, tout devient possible » et « La France forte », en 2007 et en 2012. Avant de devenir son conseiller bénévole à l’Elysée.

Sarkozyste et Chiraquien

Gaulliste dans l’âme, Jean-Michel Goudard inventait déjà pour Jacques Chirac, dont il fut un fidèle, la formule « Oui à la France qui gagne », lors des élections législatives de 1978. Un succès qui a permis au RPR, ancêtre de LR, de garantir à la droite une majorité à l’Assemblée nationale.

Refusant de choisir son camp, le publicitaire restera, à vie, à la fois, chiraquien et sarkozyste. Il aura fait cinq campagnes présidentielles, en aura perdu deux. Il a assisté, en coulisses, à la revanche de François Mitterrand en 1988, au sacre de Jacques Chirac en 1995, au séisme de 2002… Au passage, Jean-Michel Goudard a formé à la communication politique Claude Chirac, dont il était le témoin de mariage.

« C’est la fin d’une époque, estime David Genzel, observateur du monde de la publicité. Il était l’une des rares personnalités au carrefour de la publicité, de l’influence et de la politique. »

L’homme qui n’existe pas

Maître communiquant, Jean-Michel Goudard, qui n’était pas à un paradoxe près, était pourtant un homme de l’ombre. Il fuyait les médias. « Je suis l’homme qui n’existe pas », avait-il un jour confié à « L’Obs ». « Il était un ermite de luxe. Il vivait en marge de la société médiatique, de la société politique… et comme tous les ermites, il avait énormément réfléchi, infiniment lu et beaucoup écrit, raconte Jacques Séguéla aux « Echos ». C’était l’homme de marketing le plus intelligent que j’ai rencontré ».

Né à Montpellier, Jean-Michel Goudard a fait ses classes à HEC et ses armes chez Procter et Gamble. Dès 1970, il dirige Young and Rubicam. Et après avoir cofondé RSCG, il part, vivre à New York pour piloter Euro RSCG à l’international. Outre-Atlantique, il fréquente l’influent Roger Ailes, architecte de la victoire à la Maison Blanche de Ronald Reagan et de George Bush père. Un mentor qui briefera son ami Jacques Chirac. « Le point G d’RSCG est parti dans le monde des rêves. Rêve in peace », a souhaité Frank Tapiro, créatif à l’agence depuis 1987.

En 1996, Omnicom confie à Jean-Michel Goudard son réseau BDDO dans le monde. « Il avait le double talent d’être un grand patron et un grand créatif ce qui est rare », avait déclaré, à « L’Obs », Claude Chirac, décrivant un personnage « qui sort du cadre ».

Coups de griffe

En 2006, le jeune retraité revient au pays. Riche. Et lorsque, sur une plage de l’île Maurice, Nicolas Sarkozy lui demande de rejoindre sa campagne présidentielle, Jean-Michel Goudard accepte. Gratuitement. C’est son luxe, et le prix, dira-t-il, de sa liberté.

On le disait « brillant » voire « cynique ». Et il avait parfois le verbe assassin. Dans les enregistrements privés dévoilés en 2014 par l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, Patrick Buisson, on entend ses commentaires aiguisés. « Il pouvait être mordant. Les coups de griffe étaient plus nombreux que les caresses», poursuit Jacques Séguéla.

Car Jean-Michel Goudard, mordu de vélo, grand amateur de corrida et fan du Japon était un être complexe. Catholique mais épicurien et homme à femmes, doté d’un humour tranchant, ce fils d’un milicien déchu de ses droits à la Libération, était, selon ses proches, un affectif, sensible, écorché.

Depuis des années, il souffrait de pemphigus, une maladie orpheline qui attaque la peau, lui imposant de longs séjours à l’hôpital. « Quand on s’inquiétait de sa santé, il avait coutume de répondre : « Ca va, je suis en train de crever ! » », rapporte « Libération ».

« Il pratiquait sans cesse l’autodérision, témoigne son ami Alain Cayzac. Il y avait en lui, à la fois, une grande rigueur et un grain de folie. Souvent nous le surnommions le ‘félé’. Il était un mélange de principes et de liberté. »

« Solaire et sombre »

Incroyablement fidèle en amitié, mais aussi provocateur, stratège, calculateur pour certains, ce père de trois enfants n’était pas moins généreux. « C’était un être d’une ambiguïté totale. Il était à la fois solaire et sombre », résume Jacques Séguéla qui cite aussi sa « fureur de la rigueur » : « Il ne supportait pas l’approximation ».

Jean-Michel Goudard avait le goût de la formule et les détails en horreur. « Il avait l’intelligence de simplifier les messages complexes. Et il détestait les longs discours, dépeint encore Alain Cayzac. C’était quelqu’un qui ne faisait pas semblant ». D’ailleurs, il avait écrit un livre sur ses fiascos et refusé la Légion d’honneur.

Rattrapé par l’affaire des sondages de l’Elysée, il avait été mis en examen en 2016. Il y a quelques jours encore, dans son mas de Provence, « les oliviers veillaient jalousement sur sa solitude, écrit, dans « Le Point », l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy et actuel maire de La Baule, Franck Louvrier. En communication, je me permets de lui dire maintenant qu’il aura été mon mentor ».

Related Posts

LEAVE A COMMENT

Make sure you enter the(*) required information where indicated. HTML code is not allowed

CAPTCHA ImageChange Image