Menu

les patrons de PME plus cachotiers, Fiscalité et droit des entreprises

les patrons de PME plus cachotiers, Fiscalité et droit des entreprises

En matière financière, le Covid-19 risque bien de renforcer l’adage « pour vivre heureux, vivons cachés ». De plus en plus pratiquée avant la pandémie, la confidentialité des comptes devrait tenter plus d’un patron de TPE-PME confronté à des comptes dégradés. Selon le bilan national dressé par les greffes des tribunaux de commerce, dévoilé jeudi 28 janvier, 47 % des entreprises ont opté pour la confidentialité en 2020, contre 41 % en 2019 et 36 % en 2018. « Aujourd’hui, l’exception est de rendre publics ses comptes », estime, même, Laurent Benoudiz, président de l’Ordre des experts-comptables d’Ile-de-France.

La réglementation a ouvert le champ des possibles. Auparavant circonscrite aux micro-entreprises pour les comptes annuels, la possibilité de ne pas rendre public les comptes de résultat a été étendue par la loi Macron de 2015, puis la loi Pacte de 2019 aux petites PME. Elles doivent remplir deux des trois critères – moins de 12 millions d’euros de chiffre d’affaires net, 50 salariés, et total du bilan de 6 millions d’euros. Une fourchette qui englobe presque 95 % du tissu des entreprises françaises.

Comment cela fonctionne ? Une fois leurs comptes clos et validés, les entreprises doivent les transmettre à l’administration fiscale. C’est lorsqu’elles les déposent ensuite – là aussi, une obligation – auprès du greffe du tribunal de commerce, qu’elles peuvent opter pour une déclaration de confidentialité de leur compte de résultat. Dans ce cas, les comptes ne seront pas rendus publics, mais accessibles uniquement à l’écosystème bancaire, dont la Banque de France, et aux administrations qui le demandent.

Les patrons de PME de plus en plus adeptes de la confidentialité des comptes

Les dirigeants craignent une cotation dégradée de la Banque de France

Pour éviter une cotation annuelle dégradée de la part de la Banque de France, nombre de dirigeants pourraient être aussi tentés de ne pas transmettre leurs bilans à la Banque de France. Ce n’est pas un geste obligatoire (même si l’institution bancaire peut en demander l’accès). Une crainte infondée, a assuré la Banque de France, qui a indiqué qu’elle prendrait en compte la crise sanitaire exceptionnelle. « Il ne faut pas avoir peur de la cotation et au contraire, prendre les devants pour expliquer ses difficultés à son conseiller », conseille Laurent Bénoudiz, à la tête des Experts-comptables d’Ile-de-France. L’institution note entre 250.000 et 260.000 entreprises réalisant plus 750.000 euros de chiffre d’affaires. Cette note sert de référence aux réseaux bancaires pour l’accès au crédit.

Au-delà des difficultés financières ou non de l’entreprise, le compte de résultats dévoile bien des indices : les ventes et les achats de marchandises, les marges commerciales, la masse salariale, la politique d’investissement, la stratégie industrielle. Un vrai livre ouvert sur ses forces et ses faiblesses. Les arguments sont nombreux pour ne pas en dévoiler la teneur aux concurrents, ou pour se cacher en cas de méforme ou même de réussite de l’entreprise.

« Les bénéfices élevés peuvent inciter un fournisseur à tirer sur les prix, des pertes peuvent inquiéter et éloigner les clients », glisse un greffier. « Ce secret des affaires est essentiel, déclare Lionel Canesi, président du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables, et cela n’empêche pas le dirigeant de transmettre son compte de résultat lorsque son banquier, son assureur-crédit ou un fournisseur le lui demande. »

Amende en cas de non-dépôt des comptes

Cette culture du secret est bien ancrée. En réalité, avant même que la loi n’étende la confidentialité , bien des patrons la pratiquaient en ne déposant même pas leurs comptes du tout ou en optant pour la confidentialité sans être dans les seuils autorisés. Une des raisons étant la quasi absence de sanction. Dans les faits, les patrons risquent une pénalité de 1.500 euros, voire une mise sous astreinte par le tribunal de commerce.

Sur le terrain, la tolérance est de mise. « J’ai beaucoup de clients qui déposent leurs comptes après trois ou quatre années de retard seulement quand ils sont mis en demeure, et ce n’est pas forcément des entreprises qui vont mal », souligne Laurent Benoudiz. « Les juges sont certes compréhensifs, sauf si c’est pour cacher des difficultés et un possible dépôt de bilan », détaille Valérie Creusot-Rivière, à la tête d’Expertis CFE, et présidente de l’Ordre des experts-comptables de Lorraine.

Car, c’est une inquiétude des acteurs de la prévention : à l’heure où le taux de défaillance historiquement bas – le plus bas depuis trente ans – cache des difficultés qui risquent d’exploser à la fin des aides d’Etat, la non-publication et surtout le non-dépôt des comptes tend à brouiller les pistes. Par ailleurs, dans un contexte incertain, opter pour l’opacité et le secret peut être une erreur stratégique. « Je conseille plutôt aux dirigeants d’être transparents. Aujourd’hui, tout le monde a le réflexe d’aller voir sur Internet la situation d’une entreprise. Ne pas le dire peut-être contre-productif et interprété comme le fait qu’il y a quelque chose à cacher », pointe Valérie Creusot-Rivière.

Solidarité avec les entrepreneurs
Dans cette période difficile, les entrepreneurs et dirigeants de TPE-PME ont plus que jamais besoin d’être accompagnés. Le site Les Echos Entrepreneurs apporte sa contribution en proposant informations et témoignages gratuitement pour les prochaines semaines.
>>> Pour rester informés de l’actualité entrepreneurs et startups,
pensez à vous abonner à notre newsletter quotidienne
et/ou à la newsletter hebdomadaire Adieu la crise !

Related Posts

LEAVE A COMMENT

Make sure you enter the(*) required information where indicated. HTML code is not allowed

CAPTCHA ImageChange Image