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McKinsey : « La période qui s’ouvre va être très structurante pour les organisations », Transformation

McKinsey : « La période qui s'ouvre va être très structurante pour les organisations », Transformation

L’adaptation des compétences et des rôles des employés est cruciale dans les temps qui s’annoncent, avertissez-vous dans une note que vous avez coécrite. Par où commencer ?

Je voudrais d’abord attirer l’attention sur le fait que la période qui s’ouvre est probablement plus compliquée à gérer que le confinement lui-même. Cette phase transitoire va fixer les usages pour l’avenir en matière de consommation et de comportements et redéfinir les modes de travail.

Dans ce contexte, la première étape, pour les entreprises, consiste à identifier les compétences dont leur modèle d’affaires a besoin pour naviguer. Il leur faut déterminer les mutations des attentes des clients et les compétences nécessaires pour y faire face. Quand, avant la crise sanitaire, leur activité était réalisée au travers d’un réseau de distribution 100 % physique, elle est devenue 100 % à distance pendant le confinement. Il leur faut maintenant trouver le bon équilibre entre les modalités de prestation de services.

Une entreprise peut avoir besoin de compétences différentes dans la manière de gérer la relation avec un client, selon qu’il est contacté en visio conférence ou qu’il se rend en agence ou en boutique. Elle doit identifier et acquérir les compétences dont il est certain qu’elles vont servir dans l’immédiat, tout en développant des aptitudes supplémentaires pour garantir la transformation et la continuité de l’activité à long terme. 

La situation exige une gestion anticipée très précise des savoir-faire et des savoirs être, et du déploiement des ressources. Elle pose aussi la question du management des équipes qui fonctionnent en mode hybride. C’est un enjeu fort.

L’agilité, tant préconisée, est-elle accessible à toutes les entreprises ?

En une nuit, aux Etats-Unis, une grande société pharmaceutique a vu passer le métier de ses 10.000 délégués médicaux de 100 % d’interactions humaines à un dispositif 100 % à distance. Tous n’y étaient pas préparés. Les entreprises doivent maintenant s’assurer de donner, à l’échelle, des compétences de base pour opérer dans un environnement digital. Plus que la seule maîtrise des outils technologiques, il faut s’interroger sur ce que l’interaction à distance, avec un salarié ou un client, signifie, ce que le recours aux outils digitaux implique en termes d’environnement visuel, d’environnement sonore et de capacité d’empathie.

En l’espace de trois à six semaines, on arrive à donner un socle de compétences techniques et une sensibilisation à la dimension sociale et émotionnelle. Cette montée en compétences se fait souvent par des approches par lesquelles le collaborateur est lui-même le moteur de sa formation. Ce qui veut dire que l’on touche à la question de l’engagement.

Les outils sont une chose, arriver à mobiliser à grande échelle les collaborateurs, y compris ceux qui sont encore à domicile, en est une autre.

L’année dernière, une enquête de McKinsey pointait que 87 % de dirigeants redoutaient un manque de compétences au sein de leurs organisations. Avec la crise sanitaire, les entreprises ont finalement trouvé beaucoup de ressources à l’interne…

Le niveau de transformation des organisations n’a, en réalité, jamais été aussi rapide. 
Le travail à distance est quasiment passé, du jour au lendemain
, en de moins de 10 % à 100 %, pour des métiers qui le permettaient. Au Royaume-Uni, en l’espace d’une semaine, on est passé de 1 % à 97 % de téléconsultation médicale !

Il y a eu beaucoup d’idées, beaucoup d’innovations… Un dirigeant me disait, la semaine dernière, que ses équipes avaient réglé, en l’espace de deux jours, un problème sur lequel elles travaillaient depuis deux ans ! Cela rend optimiste sur la capacité des entreprises et des collaborateurs à se mobiliser lorsqu’il n’y a pas d’autre choix. La situation a prouvé que les organisations pouvaient bouger très vite, y compris les grandes qu’on imaginait marquées par une certaine inertie et qu’elles étaient capables de transformer radicalement la manière dont elles opéraient. 

Mais la bascule s’est faite de façon un peu « artisanale » et même si une partie du déficit de compétences a pu être comblée grâce aux ressources internes, je reste prudent. Un palier doit encore être franchi sur les compétences technologiques. Et deux questions demeurent : comment pérenniser, sur un temps long, en termes de modèles managériaux, ce qui a été réalisé en mode commando pendant dix semaines ? Et comment s’assurer de retrouver rapidement de très hauts standards d’interaction et d’expérience client, dont la dégradation a pu être tolérée par les clients pendant le confinement ?

Du déconfinement au stade post-crise, comment les entreprises doivent-elles réagir ?

Elles doivent avancer résolument, tout en marchant sur des oeufs ; elles sont en phase transitoire et le retour à la « normale » ne pourra se faire que quand le risque sanitaire aura disparu, c’est-à-dire avec un vaccin ou un traitement disponibles à grande échelle. A l’aune d un changement profond des interactions avec leurs clients et des organisations en interne, elles doivent faire vivre un mode hybride. La situation leur demande de mener en 12 à 24 mois des évolutions qu’elles projetaient de mener en six ans. La rupture de pente, dans la courbe de transformation, est sans précédent. L’enjeu est là. Cette période, 
entre déconfinement, où l’on recouvre ses capacités d’action
, et post-crise, où l’on sera complètement serein sur le risque sanitaire, va être très structurante pour les organisations. Ce n’est pas dans les dix dernières semaines que les usages et les modes de consommation de demain ont été définis, mais c’est dans les six à douze mois à venir qu’ils le seront.

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